petit-breton a écrit:Hallucinant spectacle dans nantes. La police, les crs, les militaires quadrillent les rues commerçantes. Camions à eau rue stationné rue d'Orléans, dizaines de véhicules place royale, d'autres encore coupent la circulation rue de Strasbourg. Partout, partout, on ne passe pas 10 secondes de balade sans se retrouver face à un golgoth surarmé.
Et le plus dingue... Voir les gens continuer leur shopping comme si de rien n'était, sans y prêter attention. C'est normal, la police veille, vous pouvez tranquillement faire les magasins.
C'est vrai que c'est dingue. Mais j'ai assisté à une scène bien plus glaçante, près de la place du pilori, un manifestant qui avait son chèche sur le visage, une matraque, bref, tout son équipement militant, il marchait tranquillement en demandant le chemin vers le McDo (il connaissait pas trop Nantes a priori), et là, d'un coup, trois personnes l'ont entouré, trois personnes qui faisaient leur shopping, qui avaient des sacs « Galeries Lafayette », « Dior », « Vuitton » et « Tiffany's » au bras, et qui ont dit au jeune homme « Vous êtes là pour nous empêcher de faire nos achats ! Vous êtes là pour briser les vitrines de nos lieux de consommation ! Vous êtes l'ennemi du capitalisme de jouissance et d'asservissement, de l'échelle de valeur sans laquel nos vies n'ont plus de valeur ! » Et alors, d'autres personnes sont venu encercler le jeune homme, un attroupement s'en est ensuivi. Plusieurs femmes qui faisaient du shopping se sont dévêtues entièrement et, sous leur uniforme de shopper, en fait, il s'agissait de CRS, et sous leur masque de bourgeoises on a pu voir apparaître des figures casquées et les sourires maléfiques des agents de l'oppression.
J'ai entendu la voix du jeune homme appeler, tel un oisillon, en disant « Je suis venu défendre la liberté ! Je suis là pour sauver l'humanité de sa perte ! Pour combattre l'injustice ! Pour rendre le monde meilleur ! ». Mais je ne le voyais plus, sous la foule de tous ces anonymes qui, en réalité, agissaient pour le compte de la police, étaient probablement eux-mêmes des agents en civil. Un homme entre deux âges m'a pris à partie. « Qu'est-ce que vous faites ? Que regardez-vous ? » Mon visage devait dire toute mon angoisse face à cette violence d'État. « Vous ne savez pas que c'est l'état d'urgence ? Allez, rentrez chez vous ! » Derrière sa moustache et sa casquette rayée de grand-père, ce monsieur était, lui aussi, un agent du capitalisme. Ce que j'avais pris pour une baguette de pain sous son bras était, vraisemblablement, un nouveau modèle de flash-ball. D'évidence, son duffel-coat était de marque Burberry. Je m'éloignai sans un mot quand, dans mon dos, j'entendis la voix de l'homme, coupante comme une machette un soir de génocide, m'interpeller de nouveau. Je me retournai : du doigt, il désignait avec autorité le plus proche bureau de tabac. « Avant de partir, n'oubliez pas, c'est aujourd'hui mardi. Avez-vous validé votre ticket Euromillions ? »