Portrait d’Imran Louza mercredi dans O-F, signé J-M Boudard.
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Imran Louza a toujours échappé aux radars des sélections nationales, jusqu'à ce 5 septembre 2017. Pour sa première rencontre internationale, il ne va pourtant pas enfiler le maillot bleu de son pays, mais celui de la branche paternelle, le Maroc, pour lequel il inscrira le but vainqueur contre... la France (3-2).
L'histoire est parfois ironique. « Cette fois-là, j'ai accepté car j'ai pensé que c'était un moment plus important que les autres, raconte Imran, qui avait, jusqu'alors, poliment repoussé toutes les sollicitations. Je sentais que ça pouvait être une bonne expérience et me donner de la visibilité. »
Ce match a changé les regards des observateurs, pas de ses formateurs. À Nantes, on n'a pas tardé à repérer ce joueur au toucher de balle soyeux, à la vision lumineuse. Il a 7 ans, achève sa première saison à l'Étoile du Cens et est appelé pour disputer des tournois avec le FC Nantes, dont il rejoindra l'école de foot l'année suivante. « On se dit whaouh, rembobine celui qui a commencé à taper la balle au city stade voisin de l'immeuble du Bout des Pavés, dans les quartiers nord. On sait tous ce que le club représente ici, même si, à cet âge-là, tu ne réalises pas tout ce qu'il y a derrière. Le foot, c'est alors surtout les potes. »
C'est aussi les matches à la Beaujoire, en tribune Loire, un rituel partagé avec sa mère. « Elle a grandi avec ces ambiances. On allait souvent au stade, toujours avec le petit sandwich. C'était pas mal, d'ailleurs. »
Comme Valentin Rongier avant lui, Imran Louza a franchi chaque étape des catégories de jeunes des Jaune et Vert en compagnie d'Élie Youan. « On joue ensemble depuis les U7 et ça aide beaucoup. C'est toujours une chance d'avoir quelqu'un sur qui compter chaque jour à l'entraînement, et même en dehors. C'est un vrai plus. »
Comme son illustre prédécesseur, il évolue au milieu depuis son repositionnement en U14. Comme lui, il a fini par pousser la porte du centre de formation. « C'est quelqu'un de sérieux, calme et poli, qui a toujours fait l'unanimité », souligne Matthieu Bideau, en charge du recrutement des jeunes Canaris.
Assez pour être élu, l'an dernier, au Comité d'entreprise et représenter les joueurs, avec Abdoulaye Dabo. Assez pour hériter, chaque saison, du brassard de capitaine. « Au début, j'avais du mal car mes coéquipiers restaient au centre et, moi, je rentrais à la maison, explique cet enfant unique, qui a grandi avec sa mère. C'était mon choix. Je ne voulais pas me fermer à la vie, mais eux vivaient ensemble et avaient davantage d'affinités. J'ai dû montrer plus de caractère. »
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De sa génération, il aura été un des derniers à signer son premier contrat professionnel. C'était en février dernier, à quelques mois de la fin de son bail en U19, où tout se joue. « La dernière année, on est face à l'incertitude et il y a toujours un peu de pression, confie Imran Louza. Mais honnêtement, je ne me prenais pas la tête avec ça, je ne demandais rien et je vivais au jour le jour. C'est comme lorsque j'ai intégré le centre. J'ai compris que ça devenait sérieux, mais je n'ai jamais réellement pensé en faire mon métier. »
Pour celui qui est né le 1er mai 1999, tout s'est débloqué naturellement. Avec le temps et du travail. La saison passée, mine de rien, il aura disputé 21 matches avec la réserve, dont 18 comme titulaire, prenant une part active à la remontée en N2. De sa génération, personne n'a fait mieux. Et, si on doit remonter dans un passé proche, c'est aussi plus que Valentin Rongier au même âge.
Il a engrangé de l'expérience, élargi sa palette, aussi. Ce fan d'Iniesta, qui a le souci de la passe juste, est parfois monté d'un cran pour jouer en soutien des attaquants. S'il manque d'explosivité pour s'installer à ce poste, son sens du jeu et sa capacité à sentir les coups lui ont permis d'être souvent décisif, avec quatre buts et trois dernières passes. « Dans ces zones-là, tout va plus vite et je préfère être face au but », reconnaît Imran Louza.
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Il a ajouté des séances de musculation à son programme. Comme depuis son arrivée au club, il continue de le couver sans l'exposer, ni le ménager. Quitte à lui forcer sa nature. « C'est un garçon attachant, pour lequel tu as envie de te battre, poursuit Pierre Aristouy, qui ne l'a pas lâché d'une semelle la saison passée. J'ai toujours été exigeant avec lui. »
Depuis le début de saison, Imran Louza poursuit son apprentissage, étonne par sa capacité à s'adapter aux joutes plus intenses de la N2. Il a inscrit le but de la victoire face au PSG (0-1) en septembre, porté le brassard au début du mois de novembre face à Vannes (2-0) et a pris la lumière samedi dernier, avec ce lob millimètré de près de 50 mètres, qui a offert la victoire aux Jaunes à Furiani (1-2). « Le coach m'a beaucoup aidé dans ma progression. Déjà, il a eu confiance en moi. Il est dur et ne laisse rien au hasard, en match comme à l'entraînement. On est jeune et il ne faut pas toujours aller dans notre sens, il faut parfois nous bouger. » Pour, un jour, entrevoir le feu des projecteurs.